Stage de Survie en montagne
Lors de mes petites aventures vélocypédiques estivales des années passées, je me suis dit que j’en avais marre des campings et qu’il était grand temps que je franchisse le cap du bivouac. Je l’ai fait à quelques reprises, mais je n’étais pas à l’aise, j’avais besoin d’un coup de pied au cul pour m’y mettre pour de vrai. Début d’année, je me suis lancé avec l’aide de quelques énergies bienveillantes : c’est décidé, je ferai un stage de survie.
Pas évident de s’y retrouver sur les Internet, y’a pléthore de boites qui en proposent. Ça va de l’initiation la plus sommaire, à la semaine en mode Rambo, en passant par le séjour en immersion dans le grand Nord.
Après un peu de recherche, je vise un stage de 3 jours, autour de la survie en montagne. Les avis sont positifs, je m’inscris. Une heure plus tard, l’instructeur me rappelle. On se jauge, il vérifie que mes attentes correspondent à son offre, et vice versa. C’est tout bon, le mec a l’air bien, et ce qu’il m’explique me fait dire que j’ai fait le bon choix.
Stage de survie nature aux Glières
Nous voilà fin Mai, le stage c’est demain ! Je passe la nuit chez Roro, je me gave de tartiflette. Vendredi matin, départ 7h pour être à 9h sur le plateau. C’est parti pour 3 jours d’aventure !
On est 8 gars à se retrouver sur la terrasse de l’auberge du plateau. Il pleut et il ne fait pas chaud. Stéphane, notre instructeur, nous briefe pendant 2h. Au fur et à mesure de ses explications, je me rends compte que je ne suis pas prêt !
C’est à dire que je suis extrait d’un seul coup de mon cocon de confort, de ma routine quotidienne. Je réalise que je vais tout abandonner là maintenant tout de suite ! Plus de téléphone, plus de chocolat, plus d’apéro, plus de café, plus de clope électronique, plus rien. Ma bite et mon couteau comme on dit.
D’entrée, 2 choses me frappent : un, Stéphane est le sosie parfait de Walter White, du coup je rigole pas trop, deux le stage va tourner autour de situations “merdiques” (c’est le mot du weekend).
Le pitch de ces 3 jours est simple : tu pars randonner à la journée, et il t’arrive une merde (seul, à deux ou en groupe), tu vas apprendre à te mettre en sécurité. la première journée et première nuit seront l’apprentissage, la deuxième la mise en pratique.
Les priorités
Là tu comprends tout de suite ce qui t’attend. La règle des 3 “S”. Qu’est ce qu’il se passe, quelles sont les priorités à 3 secondes, à 3 minutes, à 3 heures, à 3 jours. Dans mon cerveau je vois la bouffe s’éloigner et je me dis que je vais en chier.
A 3 secondes, tu risques la blessures plus ou moins grave, l’accident, la chute. Le but est d’éviter ça, donc de faire attention, donc de savoir s’orienter et savoir marcher, et savoir se ménager en cas de fatigue.
A 3 minutes, tu risques l’arrêt cardiaque, l’étouffement, l’hémorragie. Déjà ça se complique.
A 3 heures, le risque est l’hypothermie. Ca prendra tout son sens plus tard, la nuit il pleut et il fait 4°C.
A 3 jours, la déshydratation commence à faire des siennes, donc la gestion de l’eau sera importante.
A 3 semaines, il aura fallu t’organiser pour te nourrir. Stéphane nous fait un calcul vite fait : avec notre masse graisseuse, et au vu de l’activité qui nous attend, on peut ternir 10 jours tranquille. Il est 11h, j’ai déjà faim !
Un petit truc mnémotechnique : Ce Choix Peut Me Sauver, c’est à dire :
- Conscience : les risques, être équipé, savoir s’organiser…
- Calme : éviter la panique
- Positif : le mental, ça aide
- Mobilité : bouger, pour pouvoir trouver du secours ou se signaler (donc savoir s’orienter)
- Souplesse : savoir s’adapter
A la fin de briefing, on fait un petit atelier théorique sur l’orientation à la boussole, j’adore ! Et enfin : examen du contenu des sacs : tout le monde vire la moitié de ses affaires… La bite et le couteau que je te dis.
Randonnée et bivouac
C’est parti pour une marche d’orientation. On vise soit des points sur la carte, soit des points dans la montagne. Il pleut, au bout de 10m j’ai les pieds trempés, ça promet !
J’ai faim, j’ai envie de fumer (des vraies clopes !), et de boire. Je me sens frustré. Heureusement, on ne chaume pas, et l’ambiance est bonne dans le groupe.
On marche, Stéphane nous livre un peu de sa vie, un baroudeur amoureux de la vie en pleine nature, fou des grands espaces. Je suis fan. On marche encore. On fait un petit topo sur l’eau. Il pleut de plus en plus fort, je crois qu’on appelle ça un orage.
En fin d’aprem on arrive vers notre lieu de bivouac, un replat sur un flanc de vallée. Je suis rincé et crevé, je ne m’attendais pas à en chier autant. On a droit à un cours sur les noeuds, je suis une brelle en noeud, je me sens lent. On s’installe pour le bivouac, je pète la dalle.
Le premier soir, sous mon tarp avec Olivier, un trailer de 50 ans. On a froid. On resterait bien dans notre sac de couchage, mais il est super tôt et il faut aller chercher du bois pour le feu. Du bois mouillé ! Mais bon ce soir c’est fête, on a droit au sac de couchage ! Aucune idée de l’heure, on passe la soirée autour d’un feu, Stéphane nous livre quelques petits trucs à emporter dans notre cerveau, on est bien près du feu, on essaye de se sécher les pieds. Ha oui, on apprend les rudiment du feu en mode survie. Vers 22h, direction dodo.
Jour 2 : mise en pratique
Réveil à l’aube, il fait beau (pour l’instant). On refait le feu, et se fait des tisanes à base d’épines d’épicéa. Ca réchauffe, ça requinque, ça sera ma seul nourriture des 3 jours. On se fait le débrief de la nuit. Perso j’ai pas trop trop mal dormi, mais j’ai eu froid aux pieds toute la nuit. On se regarde avec les gars, la gueule enfarinée, jusqu’au moment où l’un d’entre nous sort “punaise je me demande ce que je fous là”. Et les autres de répondre “mais grave moi aussi je me demande ce que je fous là !”. Ca nous aura fait du bien, ça nous soude. C’est beau où on est, je me sens dans mon élément. On se refait un cours sur l’hypothermie (RECC), et une mise en pratique. Je passe les détails.
On se met en route, on plie le camp (on efface nos traces), et on part crapahuter, direction notre lieu de bivouac du lendemain. La rando est top, on ne marche que dans les bois en dehors des sentiers battus. Parfois on suit les traces d’animaux. On monte on descend, on remonte. On atteint notre lieu de bivouac de ce deuxième jour.
Petite blague de Stéphane : “vous êtes comment niveau eau ?”. Nous : “ben on a tout bu on est à sec !”. Et ben on va redescendre au ruisseau chercher de l’eau pour la nuit ! L’aller retour nous prendra 2 bonnes heures !
En chemin retour de la corvée d’eau, on fait un petit cours sur la nutrition, mais c’est à la marge, Stéphane nous montre quelques plantes, c’est pas ça qui va nous nourrir durablement.
Dans l’aprem on retourne au lieu de bivouac, et on s’installe. On est en binome, et ce soir sac de couchage interdit ! je suis avec Sébastien, un gars plus jeune que moi, super sympa, on s’entend à merveille, c’est chouette. On se monte un tarp en forme de triangle, ça fait un abri pour une personne. Pendant que l’un dormira, l’autre entretiendra le feu (ben oui, ça caille). On évalue nos besoins en bois pour la nuit, on passe 2 à 3 heures à chercher du bois, tout est trempé.
Le soir on apprend à faire du feu sous la pluie. Trouver un rondin, le travailler au couteau pour faire des copeaux depuis le centre qui est sec, sans tout arracher… Le mec te fait ça facile, moi je galère, je n’y arriverai pas.
J’ai faim, je suis crevé, j’ai soif d’eau, je me rationne. Mais qu’est ce que je suis heureux d’être là ! La fatigue enlève beaucoup de ma lucidité, je me sens un robot. Mais noble : j’avance pour gérer mes priorité dans cet environnement. Je me rends compte que je me suis complètement pris au jeu, c’est fou.
On termine la journée en faisant une formation premiers secours. Je passe, faudra que je potasse de nouveau. La soirée se passe autour du feu commun, on papote, il fait froid. On va se coucher.
Avec Sébastien, on fait des tour de garde d’1h30. Ca marche bien, on arrive à dormir, le bivouac est plutôt confortable pour celui qui dort. L’autre veille. j’ai failli m’endormir. Le premier tour de garde était interminable. Le suivant passera super vite. J’en profite pour réfléchir à tout ça, et je classe les choses qui manquent : la clope (la vraie – ça c’est une surprise), la bouffe, la fatigue / le café, l’alcool. Au final, je réalise que je peux me passer de tout ça facilement, trop content.
Cette nuit je prendrai les 2 derniers tours de garde d’affilé, je suis trop heureux. A partir de 4H du mat, la vie s’éveille. Le bruit des oiseaux, la lune qui va se cacher, les grosses bestioles qui fouinent, et enfin le soleil qui arrive. Tout est beau. On est a flanc de montagne, au milieu de la forêt, on domine la vallée 300m plus bas. Le soleil se lève au fond, ses rayons lèchent les sapins au milieu de la brume. Je fonds tellement c’est beau. J’ai un petit regret de ne pas avoir pu prendre de photo.
Dernier jour
On se lève, on plie le camp, on efface nos traces. Tout le monde est bien. Heureux d’avoir survécu à la nuit ! Et au fond, heureux de savoir qu’on va rentrer.
Stéphane nous a concocter une dernière rando histoire de nous achever. On part tôt, on vise de l’autre côté de la montagne en face, pour récupérer un sentier qui nous ramènera à l’auberge.
La rando se fait sur un rythme de fou, je n’arrive pas à suivre, je suis à la peine dans les montées. Je n’ai plus faim, mais la fatigue est là. On monte jusqu’à quasiment 2000m, il y’a encore de la neige. Je me reprends dans la descente et sur le plat, je rejoins la tête de la rando. Encore quelques centaines de mètres et on arrive.
Après 3 à 4 heures de marche sur un bon rythme, on arrive ! On boit un coup vite fait, on debrief, tout le monde est enchanté.
Il faut déjà se quitter. Je vais me venger : je vais trouver un endroit où me goinfrer en route !
Bilan
Je ne m’attendais pas du tout à ce type de stage. Il y avait le côté nature, mais il était centré sur la sécurité en randonnée. Et c’est tant mieux, je me suis rendu compte qu’avec pas grand choses, je pourrais voyager plus en sécurité. C’est aussi la base de l’autonomie. J’ai aussi appris plein de trucs pratiques. Je n’ai qu’une envie, c’est de tester grandeur nature ! La tente, c’est surfait !
Je mets une mention spéciale à Stéphane, notre instructeur. Si vous chercher un stage nature ou survie, je ne peux que vous conseiller de faire appel à lui. Voici son site : Stéphane VIRON – Académie des Techniques de Survie.